Notre patrimoine architectural
UN HOTEL DE MAITRE PLACE DU PERRON
Un troisième bâtiment remarquable de la place du Perron est le n°10, voisin de la maison du meunier de Theux, il a été édifié lui aussi, mais un siècle plus tard, par un autre « meunier », celui de Spixhe qui s’appelait Lambert-Jean de Marteau [[Le premier de cette lignée de meuniers était Henri de Marteau (ou Martéa) qui succédait à Collar de la Boverie (vraisemblablement son beau-père)]].
Mais l’histoire du moulin de Spixhe et de ses meuniers est bien différente : le moulin banal de Spixhe était aussi propriété du Prince-Évêque mais il était attribué, à titre héréditaire, au forestier de la Porallée, ce curieux territoire, sorte de « no man’s land » entre La Reid et Remouchamps-Aywaille [[Porallée (miraculeuse de Dieu et Saint Pierre) avait pour limite une ligne passant par Dieupart, Aywaille, Florzé, Haut-Regard, Vert-Buisson, Bronromme, vallée de la Chefna, puis la rive gauche de l’Amblève, retour vers Dieupart.]], réclamé et contesté par la Principauté de Liège et le Duché de Luxembourg et plus tard par la commune de La Reid et celle de Remouchamps.
Les fonctions de meunier et forestier sont restées l’apanage de la famille de Marteau depuis l’an 1412 jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. Les de Marteau, devenus personnages importants se sont alliés à la plupart des grandes familles theutoises et à la onzième génération, on trouve ce Lambert-Jean, né en 1718, bourgmestre en 1756-57 et 1761-62, il avait épousé Catherine-Françoise de Boniver. Il avait confié la construction de sa maison à l’entrepreneur Laurent Lechanoine, celui-ci avait déjà réalisé la façade de la maison de Limbourg en Chaussée et s’en était inspiré pour édifier d’autres façades [[N°73, rue Hovémont, actuellement mercerie « Nuances » (Collette) N° 26, en Chaussée, actuellement salon d’esthétique M.A. Lepièce (ex BBL)]] : celle de sa propre maison rue Hovémont (n°73), celle d’un autre de Marteau, rue Chaussée (n°26), la modernisation de celle de Robert de Hansez, rue Hovémont,(n°92) (Cercle paroissial) et celle qui nous intéresse aujourd’hui.
Toutes ces façades présentent deux constantes : une entrée par un porche avec accès à l’immeuble par une porte latérale et les grandes fenêtres surmontées d’un linteau bombé de même allure avec clé moulurée verticalement.
Admirons cette belle façade en briques, cantonnée par trois chaînes de refends, simulant ainsi un avant-corps ouvert d’une porte cochère en plein cintre, inscrite dans un large panneau rectangulaire en pierre calcaire posée sur deux colonnettes et présentant au sommet une grande clé à cannelures verticales. La pierre calcaire se retrouve dans le large soubassement, les pierres entourant les fenêtres, le larmier séparant le rez-de-chaussée de l’étage et le bandeau sous la corniche. Le toit est ouvert de trois lucarnes à fronton triangulaire et surmonté de deux cheminées harpées (jeu du calcaire et des briques). [[(4)La cheminée de droite est invisible sur notre photo , elle avait été emportée par la tempête de janvier 91, depuis elle a été restaurée.]]
A l’intérieur de la cour, dans le mur d’une annexe récente a été encastrée une clé de voûte aux armes des de Marteau et de Boniver, datée de 1712. Il s’agirait d’une pierre qui ornait autrefois la porte de l’ancien moulin de Spixhe et aurait été placée par le père de Lambert-Jean, un Jean-Philippe de Marteau qui avait également épousé une Boniver.
de Marteau et Boniver, deux noms, ici assemblés, dont les origines remontent au 15ème siècle et qui à cette époque figuraient parmi les maîtres de forge. Ces familles theutoises ont traversé les siècles et aujourd’hui se rappellent à notre souvenir au travers de ces belles demeures, témoins de la prospérité de notre vielle cité.
Pour les Chroniqueurs du Marquisat
Pays de Franchimont N° 544 de septembre 1991
A. GONAY