D’abord à l’hôtel de Ville de Theux, puis à la salle de Spixhe, Marie-France Botte a livré une partie de son vécu au milieu de la prostitution enfantine.
Reçue dans la salle du Conseil par les autorités communales, Marie-France a accepté avec une certaine émotion quelques souvenirs de son passage dans notre cité: une médaille de la commune symbolisant notre passé, une sérigraphie de l’ASBL « Les Droits de l’Homme », quelques messages rédigés par les enfants.
Ce n’est pas par un long discours, mais par quelques mots illuminés d’un sourire qu’elle remercia la public. Son passage à Theux s’intègre dans un long périple visant à révéler la cruelle vérité sur la misère sordide que sont les bordels de Bangkok. Misère lointaine, allez-vous dire, que celle de ces enfants de Thaïlande, de Chine, de Birmanie. Situation indépendante de notre volonté, nous laissant désarmés à plus de 10.000 lieues de là, pensez-vous. Non, car ce qui se vit à Bangkok, touche aussi notre occident et ne peut laisser impassibles les défenseurs des Droits de l’Homme que nous sommes.
En quelques lignes, essayons de dépeindre cet enfer pour mieux comprendre que les Thaïs et le gouvernement thaïlandais ne peuvent résoudre seuls cette situation. D’abord, rappelons que Bangkok est la capitale de la Thaïlande, pays économiquement sous-développé. Pourtant, cet état possède une grande richesse: son industrie touristique.
Ce secteur se révèle être une aubaine pour les individus dépourvus de scrupules, pour tous ceux qui spéculent sur la détresse des faibles. En effet, si la Thaïlande fascine par la beauté de son folklore, par la richesse de son passé historique, elle captive certains touristes américains et occidentaux par ses réseaux de prostitution. Ainsi, pour quelques centaines de francs, n’importe quel désaxé peut s’offrir ce qui lui vaudrait quelques années d’incarcération pour pédophilie en Belgique. (Rappelez-vous les récentes affaires de pédophilie à Verviers).
Ces enfants de Bangkok, qui sont-ils ?
Des esclaves, séparés de leur famille par des rabatteurs contre la promesse d’une éducation et d’un travail. Pourquoi une telle naïveté? Les parents vivent dans des villages isolés ou les tribus sont le plus souvent coupées de la réalité extérieure, subsistent tant bien que mal en autarcie.
Les marchands de chair humaine n’éprouvent aucune difficulté à convaincre la famille d’un avenir plus souriant pour leur enfant. La réalité ? Inutile de faire un dessin, de l’usine au bordel, il n’y a qu’un pas.
Tout ce réseau de prostitution enfantine est orchestré par la mafia sud-asiatique, avec la corruption du pouvoir en place.
Face à ce commerce où l’offre d’enfants orientaux rencontre la demande des pervers occidentaux, Marie-France se bat au risque de sa vie. Rien ne la décourage de son engagement, ni une agression physique, ni le saccage de son domicile. Elle lutte et elle a créé avec M.S.F., la Fondation François-Xavier Bragard, du nom d’un pilote d’hélicoptère disparu avec Balavoine lors d’un Paris-Dakar.
Dans un premier temps, elle voulut en savoir plus sur la prostitution enfantine en étudiant plusieurs dizaines d’enfants. Une fois cette analyse effectuée, on envisagea un projet d’action concrète en informant les villages d’origine des enfants, en brisant l’ignorance des parents. Ainsi avec des autochtones dans les village nord de la Thailande, à proximité de la ville de Chiangra. Là, Marie-France fit prendre conscience aux parents que les belles promesses n’étaient que mensonges, que le travail, c’était le «trottoir». Mais face à cette action, la mafia a développé une autre stratégie, elle a découvert de nouveaux fournisseurs et ce sont des petits Chinois et des Birmans qui assouvissent les fantasmes des touristes.
Au-delà de cette démarche préventive à la source, deux maisons d’accueil de 40 lits ont été ouvertes. Leur objectif est l’hébergement des enfants durant six mois afin de les restructurer. Cela constitue la première étape d’une tentative de réintégration dans une vie marquée à tout jamais par le souvenir d’une enfance assassinée.
Son combat, elle ne le mène pas seulement là-bas, elle est convaincue que les pays occidentaux détiennent une part énorme de responsabilité dans ce commerce, en autorisant la parution de revues pour pédophiles (exemple: Spartacus) qui sont le point de départ de voyages organisés d’un type très particulier.
Par ce récit, vous avez découvert que Marie-France est une femme de caractère, qui a la volonté de réussir. Son projet, elle y croit, mais surtout, elle le vit.
Si des actions comme celle-ci vous interpellent, prenez contact avec les membres de l’antenne M.S.F. (via Annette Bodart, 54.25.94). Courage et prudence, voilà notre souhait pour Marie-France.
Alexandre LODEZ.
Pays de Franchimont 549 février 1992