Le curé Anseau
Pendant la majeure partie du XVIIe siècle, la paroisse de Theux fut desservie par le bon curé Jean Anseau, dont le souvenir s’est perpétué jusqu’à nos jours.
L’abbé Anseau fut un de ces bons vieux prêtres campagnards frayant avec les habitants, ayant son franc-parler et attaquant plus souvent le riche que le pauvre. A l’occasion, il ne dédaignait pas boire sa « petite goutte » au cabaret, offrant même généreusement une « tournée » aux plus déshérités de ses paroissiens. Pareille allure aurait seule suffit à le rendre populaire, mais cette attitude n’avait évidemment pas l’heur de plaire à la classe dite « aisée » qui sournoisement au cours des années 1675 à 1688 tenta de le faire remplacer par un pasteur plus distingué. Des intrigues continuelles amenèrent enfin l’arrestation du vieux curé, suivie de son incarcération à Liège en juillet 1688. Toutefois, son incarcération ayant été jugée illégale, ordre fut donné par l’Autorité Apostolique de le relaxer dans les 24 heures sous peine d’excommunication.
Son retour à Theux eut lieu le 9 août 1688. En procession, plus de 600 paroissiens, rameaux en mains, allèrent à sa rencontre et lui firent une escorte triomphale. Les habitants de tous les villages allumèrent en son honneur des grands feux de joie.
Le vieux pasteur, ému, aurait voulu trinquer en leur honneur, aussi son premier acte fut-il de payer de la bière à tous ses fidèles admirateurs. Voici le texte de cet ordre dont l’originalité ne souffre aucune éviction.
Le 10 d’août 1688.
A Monsieur Adolphe PONCELET tenant de l’Eglise parochiale de Theux
« Monsieur,
Je vous prie de livrer une tonne de bière à ceux de Theux et une tonne à ceux de Jevoumont, Hodbomont, Mont, Rondehaye et alentours ; et les remercie de leurs amitiés et si pri-je leur protecteur de partager.
Doresnavant je le serai en effet et ferai mettre au jour les tracassements qu’on leur a fait ; et que je suis coserviteur à vous. ».
Signé: Anseau
La quiétude suivit son retour, mais il ne put malheureusement en jouir longtemps. Après une courte maladie, il s’éteignit saintement, cinq mois plus tard, le 23 janvier 1689. Son souvenir resta cependant vivace pendant de nombreuses années et quelques anciens theutois en ont certainement entendu parler par leur parents ou grands-parents. C’est à leur intention qu’il nous a paru utile de leur communiquer ces quelques détails typiques extraits de » PASQUILLES WALLONNES DE THEUX » de J. Feller.
Pays de Franchimont 12 décembre 1951