Theux est en deuil.
Son Bourgmestre, Lucien Caro, n’est plus.
Ses administrés, en foules compactes, l’ont conduit à sa dernière demeure en un cortège de fleurs et d’apothéose.
Geste touchant, ultime témoignage d’un peuple reconnaissant.
Heureux ceux qui emportent dans la tombe les pleurs des humbles et le regret de tous.
Theux est en deuil.
Son Bourgmestre s’en est allé, ravi à de chères affections, à l’estime d’une population qui semble ne pas comprendre. Mais il est parti les mains pleines, un beau soir d’août, après d’abondantes et fructueuses moissons.
Bel et noble héritage entre tous, fruit des plus hautes vertus familiales et civiques, ajoutant à une juste renommée un immortel fleuron.
Lucien Caro était un caractère. En ces temps de bassesse et de compromission, il avait gardé intact, et cela avec une sorte d’élégance, le courage de ses opinions.
C’est peut-être le plus bel éloge que l’on puisse faire du disparu. Ce courage, comme il arrive toujours, devait finir par imposer le respect aux hommes, aux vrais.
Lucien Caro était venu à la vie administrative et politique sur le tard, estimant honnêtement qu’il se devait d’abord tout entier à la haute mission que lui avait confiée la Société du Nord Belge.
Belle et salutaire leçon pour ceux qui seraient enclins à prendre l’essentiel pour l’accessoire en n’apportant à leur tâche vitale que corps et esprit fatigués dans de laborieux sinon de sordides cumuls.
Mais la longue expérience qu’il s’était acquise au service d’une Société si hautement réputée pour sa merveilleuse organisation, il allait bientôt la mettre intégralement à l’actif de ses nouvelles fonctions de premier magistrat de sa petite ville natale. C’est ainsi qu’il devint un bourgmestre parfait dans toute l’acception du terme.
Aucun problème relevant de sa chère cité ne lui était étranger. D’instinct, il allait à tout et à tous avec une égale sollicitude, ne s’arrêtant jamais à de stupides et mesquines préoccupations de second ordre.
Dans le privé, il aimait à se pencher sur les misères et les deuils de ses administrés. Il n’est guère d’enterrements auxquels il n’ait apporté le réconfort de sa présence.
Ceux qui étaient à la joie le virent, tour à tour, à la tête du Collège échevinal, venant traduire fidèlement les sentiments de la population.
Parfois, il dut même s’imposer de pénibles sacrifices pour ne pas faillir à ce qu’il considérait comme un impérieux devoir de sa tâche.
Et bien qu’il ressentît douloureusement les premières atteintes d’un mal désormais inexorable, il fit face jusqu’à l’extrême limite de ses forces.
Avant de clore cette trop brève chronique, nous nous faisons un devoir de saluer en Lucien Caro, la mémoire d’un grand Bourgmestre, d’un vrai Theutois dont s’honore la Cité.
Au nom du « Pays de Franchimont », nous prions Madame Caro et sa famille, d’agréer l’expression de nos plus émues et respectueuses condoléances.
Pays de Franchimont 9 septembre 1952