Chivrou = chèvrerie, Boverie = ferme aux boeufs, Louveigné = tanière aux loups, …
Quelle poésie dans les noms des lieux de chez nous! Mais aussi que de mystères! L’âme naïve y transparait de ceux qui ont modelé le paysage franchimontois, qui ont défriché ses terres, qui ont fondé ses villages. Ne cherchant pas midi à quatorze heures, les premiers occupants de la région n’ont pas imaginé de désigner autrement que par des mots simples les traits du pays qu’ils observaient autour d’eux. Ces mots sans prétention se sont enracinés dans nos campagnes et ont conservé une vie tenace et séculaire. Bien sûr, les signes qu’ils évoquaient jadis sont aujourd’hui le plus souvent disparus… Bien sûr, les copistes les ont torturés et leur graphie s’est altérée… Aussi, en 1973, faut-il tout le flair des spécialistes (signalés en fin d’article) pour en déchiffrer le sens. Avec leur aide, on s’amusera ici à relever les noms des lieux franchimontois qui dérivent des plantes.
Remarquons immédiatement que les plantes herbacées, trop humbles, trop fragiles, trop éphémères aussi pour servir de repères topographiques, sont peu fécondes en toponymes. A par Jonkeu, du latin « juncarius (locus) » = endroit aux joncs, ce privilège est surtout réservé aux arbres. Quels arbres?
– FAYS (du latin fagetum = hêtraie)
– BECCO (romantisation germanique « beuk-holt = bois de hêtres)
– SASSOR et son diminutif SASSEROTE viennent probablement du latin « sâceur » = saule
– TILLOT du diminutif latin « tiliolus » = petit tilleul
– FRAINEUX du latin « fraxinetum » = frênaie
– ONEUX du latin « alnetum » = bois d’aulne
– STANEUX du latin « hasta » = tige
– SPIXHE du latin « spissa » = fourré épais
– BOUXHERIE du latin « buxalia » = buisson et membre de la famille wallonne « bouhe, bouxhe, bouchon »
– HESTROUMONT « heis » = brousailles
– THIER du celtique « tigernos » = sommet (Thier du Gibet, Thier de Mont, Thier d’Oneux) la tenace persistance de ce terme géographique ne peut s’accorder qu’avec l’immuable physionomie tourmentée de notre relief à travers toute la période historique.
– JUSLENVILLE du latin « jusana villa » = ville d’en bas
– THEUX « tectis » = ville aux toits
– CHIN « caminos » = chemins (Chinrue, Chinru, Chinheid)
– STOKIS = bois aux bâtons
et du Moyen Age
– JEVOUMONT = mont de Gaviulf
– HODBOMONT = mont de Hadubald
– WISLEZ = habitation de Wison
– TANCREMONT = mont de Thancrad
– FRANCHIMONT = mont de Francarius
En 898 le domaine impérial de Theux passe au Prince Évêque de Liège, nous sommes à l’aurore des grands déboisements que rappellent les noms de FRAITY « fractaria » = défriché.
– LA REID (forme de 1323) « reis – rasa » = partie rasée
– PEPINSTER « stirpus » = essart
A la fin de la période communale et tout au long des Temps Modernes, Le Pays de Franchimont prend place parmi les premiers bassins métallurgiques du monde entier. Du fond de la vallée montait alors le tapage des makas et le gémissement des roues hydrauliques. Cette période brillante de notre histoire nous a légués quelques appellations originales : POUILLOU-FOURNEAU, FORGES-THIRY, le MAKA, la MACHINE, etc…
Bibliographie :
-« Les noms de lieux de la Belgique » 1927 Vincent
-« Dictionnaire étymologique des communes belges » 1939 Carnoy
-« Bulletin de la Commission Royale de Toponyme » Tome XIV 1940 Haust
-« Dictionnaire des communes et lieux-dits » 1966 Guyot
A. Chaidron, Pays de Franchimont 1, janvier 1974